• 8

    Sherockee était assise et avait la tête appuyé contre le mur. Elle était encore énervée de ce qu’elle venait d’entendre. Elle serrait les poings pour essayer de garder son calme.

    « Heureusement que Nelson est passé par là, sinon je crois que j’aurai vraiment tué quelqu’un. Il faut que je me calme, sinon ils auront vraiment une bonne raison de me mettre en taule ou du moins ils en trouveront une, et ça va se finir dans le couloir de la mort ! En même temps il m’a cherché ce gros tas de… »

    Sherockee ?

    Elle sursauta et se cogna la tête contre le mur. Nelson alla vers elle. Il s’assit à côté d’elle. Elle se frottait la tête mais souriait. La présence de Nelson la rassurait un peu.

    Désolé, je ne voulais pas vous faire peur. Il faut que je vous explique, vous comprendrez mieux. L’homme qui était là est le directeur. Autant vous dire qu’il a les yeux rivés sur vous, chuchota-t-il en rigolant. Il n’est pas facile – j’ai pu voir que vous non plus – et je pense que son boulot n’arrange rien. Il ne veut pas imaginer que vous soyez innocente. Il a toujours cru les indices d’abord, et maintenant il est trop vieux pour que ça change ! Changeons de sujet : j’ai apporté l’enveloppe au laboratoire, on devrait avoir des résultats dans pas longtemps, sauf s’ils sont débordés en bas.

    Sherockee sourit. Ils étaient assis tous les deux l’un à côté de l’autre, attendant le verdict du laboratoire. Le silence régnait. Sherockee replia ses jambes et enroula ses bras autour. Elle coinça sa tête entre ses genoux et resta ainsi. Nelson appuya sa tête contre le mur. Au bout de quelques minutes , il s’endormit. Sherockee le regarda longuement, avant de pousser un soupir et de se lever. Elle s’étira et prit la chaise qui était dos à la caméra. Le point rouge indiquait qu’elle enregistrait toujours, mais Sherockee n’en avait rien à faire. Elle prit les photos et les regarda une nouvelle fois. Cette fois, elle faisait surtout attention aux détails du public, aux aménagements et à tout ce qui constituait l’arrière-plan. Nelson rouvrit les yeux , et la vit penchée sur les photos, très attentive. Il se redressa.

    Depuis combien de temps est-ce que je dors ?

    Je ne sais pas, peut-être quinze ou trente minutes. Je ne voulais pas vous déranger, je sais que dans votre métier, lorsque vous pouvez dormir, il vaut mieux que vous en profitiez. Jonathan aussi dormait dans les salles d’interrogatoire parfois. Sauf que lui, c’était lorsqu’il n’y avait plus personne à l’intérieur !

    Elle recommençait à rire. Il se leva et s’étira, et puis alla s’asseoir en face de Sherockee. Elle n’avait pas relevé la tête des photos. Elle scrutait chaque coin ou recoin de chaque photo. Lorsqu’il voulut lui demander ce qu’elle faisait, quelqu’un frappa à la porte. Il se leva et ouvrit.  Lorsqu’il ouvrit, il fit un grand sourire. Gwen avait gardé ses lunettes sur son nez, ce qui lui faisait des yeux énormes. Elle fit signe à Nelson de la suivre ; ils descendirent au laboratoire. Elle qui était d’habitude si souriante n’en avait plus l’ombre. Son visage était sombre.

    J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour toi. Je commence par quoi ?

    Peu importe !

    Très bien, alors la bonne c’est que j’ai réussi à prélever assez d’ADN, mais la mauvaise c’est que l’ADN nous affirme que ce sang appartient à…

    Elle marqua une pose. Elle regarda sa feuille et puis Nelson. Elle l’attrapa par les épaules et l’assit sur une chaise. Il ne comprenait pas mais se laissa faire. Elle posa ses mains sur ses genoux et le regarda dans les yeux. Il commençait à s’impatienter.

    Nelson, c’est le sang de ton fils.

    Nelson se leva d’un bond. Il remonta en vitesse dans les escaliers. Il arriva dans le couloir. Il rencontra le directeur qui voulut l’arrêter dans sa course. Nelson l’évita, prit son téléphone et ses clés sur son bureau, et sortit en quatrième vitesse. Le directeur ne comprenait pas. Il rentra dans l’interrogatoire .

    Pouvez-vous m’expliquez ce qui se passe ? Je viens de voir Nelson passer en courant dans le couloir, et quelque chose me dit que vous savez ce qui se passe !

    Comment pouvez-vous dire autant d’énormité en une seule phrase ? Je vais vous avouez que je ne comprends pas, dit la jeune femme sans relever la tête des photos. Il faudra que vous m’expliquiez !

    Arrêtez ce petit jeu tout de suite ! Vous savez ce que vous risquez si vous ne dites rien !

    Je veux bien vous dire quelque chose, mais il faut me proposer un sujet. Par exemple, aujourd’hui, il fait nuageux avec quelques éclaircies et il fait trois degrés de plus qu’hier, et demain il fera un degré de moins qu’aujourd’hui. En revanche, dans une semaine, il fera dix degrés voir moins le soir d’Halloween et…

    Ça suffit ! Arrêtez de vous foutre de moi ! cria-t-il en tapant les mains sur la table.

    Elle releva la tête des photos, elle inclina la tête et posa ses mains sur la table bien à plat. Son sourire s’était effacé de son visage. Elle regardait l’homme en face d’elle dans les yeux. Il était devenu rouge. Elle se leva tout doucement.

    Ecoutez monsieur, je n’ai pas bougé mes fesses de cette chaise depuis environ une heure. Si Nelson est parti en courant, c’est peut-être qu’il a appris une très mauvaise nouvelle en bas. Vous n’aviez qu’à le suivre pour lui demander. Je vois que le fait que je ne sois pas responsable de tout vous embarrasse fortement, mais je ne peux rien pour vous. Désolée, mais à part vous proposer d’aller voir un psychologue, je ne peux vraiment rien faire pour améliorer votre sale caractère. Alors maintenant, si vous pouviez arrêtez de me crier dessus comme… Comme un… Un je sais pas quoi, se serait super sympa. Si ça ne fait pas parti de votre plan, je vous jure que l’on sera deux à jouer à ce jeu.

    Elle était toujours restée calme, mais elle avait du mal à ne pas craquer. Il était devenu rouge écarlate. Elle était près de son visage et continuait à le fixer dans les yeux. Il baissa le regard et fit un petit rire nerveux. Il secouait la tête. Il mit ses poings sur la table, et releva le regard.

    Ça vous amuse ? Vous empirez votre cas, mais vous vous en foutez complètement ! Je pourrais vous dire que même si les juges vous mettent la prison à vie, le couloir de la mort est de plus en plus près, vous continuerez ? Vous vous rendez compte ? Vous êtes en train de tracer votre futur, c’est dommage, une si jolie fille ! Vous auriez pu avoir le plus beau des futurs, mais vous, comme une…

    Arrêtez ça tout de suite.

    Il ne l’écoutait pas, son regard brillait, il était heureux.

    – … vous ne faites rien comme il faut, vous tuez sans réfléchir et vous jouez les dure, alors maintenant, je connais votre futur. Votre futur se résume en trois mots : prison et mort !

    Elle avait craqué. Avec une force phénoménale, elle lança la table devant elle. Le directeur fut emporté avec la table contre le mur. Il avait été projeté. Pendant une microseconde, le temps s’était arrêté. Elle avait juste eu le temps de réfléchir à ce qu’elle venait de faire. Lorsqu’elle entendit la tête se fracasser contre le mur, elle fit un petit sourire. Elle n’était pas heureuse, juste satisfaite. Elle regarda vers lui, le sang coulait de son crâne. Elle s’approcha, déchira un morceau de la belle chemise du directeur et commença à lui faire un point de compression.

    Vous savez quoi, maintenant je connais votre futur. C’est bizarre mais c’est comme le mien, il se résume en trois mots : hôpital et mort. Mais il ne tient qu’à vous de changer votre destin, c’est comme pour moi. Quelqu’un ne devrait pas tarder à arriver. Je pense que vous avez peu de chance de vous en sortir, mais tout peut arriver ! Oh, et vous savez quoi ! Je vais encore empirer mon cas : je vais m’en aller de ce trou à rats !

    Elle prit la main du directeur et la mit sur le morceau de chemise. Il y avait une grande tâche de sang sur le mur. Sherockee se leva et sortit. Elle ferma doucement la porte. Elle était dans le couloir, elle partit en courant. Personne ne la vit passer, elle allait trop vite. Elle était pieds nus, elle n’avait pas repris ses chaussures, elles étaient toujours dans la salle où gisait le corps du directeur. Des agents étaient arrivés dans la salle. Les secours arrivèrent quelques minutes plus tard.


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