• Sherockee se rapprocha de la grande fenêtre s’ouvrant sur le ciel. Un grand ciel bleu, avec quelques nuages et les grands buildings. Sherockee se recula d’un pas et se tourna vers le directeur. Elle avait l’air affolé.

    – Baissez-vous !

    – Quoi… ?

    – Baissez-vous bordel !

    Elle poussa le directeur qui se rattrapa de justesse. En un instant, la vitre vola en éclat, projetant des milliers d’éclats de verre. Sherockee se jeta au sol, par-dessus le directeur. Elle lui protégea la tête avec ses mains. Ensuite, elle se mit sur le dos et, comme lorsqu’elle avait eu besoin de protéger Dimitri, elle fit une barrière invisible autour d’eux, pour les protéger des flèches qui arrivaient droit sur eux. Elle resta ainsi quelques secondes, avant de baisser les bras qu’elle avait levés, faisant disparaître la barrière, déjà invisible. Elle se releva et aida le directeur. Elle s’épousseta et retira quelques morceaux de verre. Derrière elle, un grand homme venait d’entrer. Il prit un long morceau de verre sur le sol. Il le planta dans le dos de Sherockee et le retira aussi brusquement qu’il l’avait enfoncé. Sherockee s’écroula au sol. Elle se retourna et vit Codven, son sourire carnassier tiré jusqu’aux oreilles. Il se dirigeait tout droit vers le directeur, son couteau improvisé tournant entre ses doigts. Sherockee lui fit une balayette avec une telle force qu’il tomba violemment sur le sol.

    – Il est hors de question que tu lui fasses du mal !

    – Il en sait trop ! Tu n’assumes pas tes actes ! Laisses-moi faire ! Tu n’aurais pas dû lui raconter tout ça si tu avais voulu qu’il ne meure pas ! Allez, laisse-moi faire !

    – Même pas en rêve !

    Sherockee se releva et poussa le directeur sur le côté, avant de retenir le bras de Codven. Il la frappa plusieurs fois, mais elle ne faiblissait pas. Elle le retenait chaque fois. Mais, il réussit à la pousser brutalement et à frapper le directeur à la jambe. Celui-ci essayait de s’enfuir, mais la porte était fermée et les clés ne rentraient plus dans la serrure. Sherockee s’énerva encore plus, elle se jeta sur Codven et le repoussa, mais avec une force incontrôlée. Un éclair blanc jaillit, projetant Codven au-dehors. Il tomba de l’immeuble. Sherockee essaya de garder l’équilibre sur ses jambes, mais elle s’affaissa. Le directeur la rattrapa, mais s’assit à côté d’elle. Il se fit un point de compression avec sa ceinture et se tourna de Sherockee. Elle était toute pâle et se tenait le ventre, sa plaie saignait beaucoup, mais ne voulait pas qu’il s’occupe d’elle.

    – Alors il faut que je vous emmène à l’hôpital, décréta le directeur. Et ne faites pas cette tête-là !

    – Je veux bien que l’on aille à l’hôpital, mais ce sera pour vous ! On y va ou on reste comme deux cons à discuter là en attendant le déluge ?

    Sherockee se leva, mais dut se rattraper au mur pour ne pas tomber. Le directeur se releva aussi, mais avec un peu plus de précautions. Sherockee l’agrippa et l’entraina vers la sortie. Elle enfonça la porte du pied et ils sortirent. Elle se tenait le ventre d’une main et le directeur de l’autre, mais n’arrivait pas à garder assez de force dans ses jambes pour se maintenir debout. Elle sentit une énorme pression sur ses épaules, elle avait de plus en plus de mal à garder l’équilibre. Le directeur empoigna fermement Sherockee et l’assit. Elle était encore plus pâle, son teint se confondait presque avec ses cheveux. Le directeur appela, trois personnes arrivèrent. Pendant qu’un appliquait les premiers secours, un autre appelait les secours et le dernier s’occupait tant bien que mal du directeur. Les soins procurés par l’agent à Sherockee était très bien effectué, mais ne servait pas à grand-chose. Elle rouvrit les yeux et dégagea du bras l’agent au-dessus d’elle.

    – Non, mais, ça va pas ? Vous vouliez m’asphyxier ou quoi ? Vous avez vraiment une haleine de chacal ! Prenez un chewing-gum ou allez vous brosser les dents, mais faites quelque chose !

    Les agents autour rigolèrent. Le directeur se frotta les yeux, désespéré.

    « Décidément, cette fille est folle… »

    – Je vous ne le fait pas dire ! Moi et la folie on se côtoie depuis tellement longtemps que je ne me souviens plus si on est ensemble depuis toujours ou si elle est venue quelques années après moi ! Mais peu importe, n’est-ce pas ? Qu’étions-nous en train de faire ? Ah ! Oui, nous allions à l’hôpital… Vous avez vraiment mauvaise mine, il faudrait qu’on y aille vite !

    – Mais vous délirez complètement ! Vous venez de perdre connaissance, vous ne respiriez plus ! Et puis je n’ai rien dit !

    – Mais calmez-vous enfin ! Je me reposais ! Cool Raoul, à l’aise Blaise ! D’ailleurs, comment vous vous appelez ? Allez, dites-moi s’il vous plaît !

    – Lukas ! Lukas Mullins ! Mais vous devriez le savoir depuis le temps que vous êtes là !

    – Vous me faites rire ! Si tous les agents venaient me dire leur nom et me livraient leurs secrets à chaque interrogatoire, il faudrait que je reste là des années ! C’est moi ou le couloir est vraiment très blanc ?

    – Non, on est au moins deux à le voir aussi blanc…

    – Ah ! Super ! Pour une fois, je ne serai pas la seule à délirer… Les secours ne devraient pas tarder, normalement. S’ils n’arrivent pas dans quelques minutes, je crois que vous allez finir par voir le tunnel… Si vous le voyez, oubliez la lumière et prenez la première sortie, OK ?

    Sherockee se rallongea. Elle respira longuement, les mains sur le ventre. Sa blessure saignait encore beaucoup, mais elle n’avait plus trop mal. Elle se tourna vers le directeur mais fut prise de violents vertiges ; elle avait la tête qui tournait violemment, brouillant sa vision. Malgré tout, elle réussit à voir Lukas, allongé au sol, adossé contre le mur. Il se tenait la jambe, mais avait toujours une assez bonne mine. Les agents autour avaient l’air un peu plus détendu, mais ils gardaient un œil vigilant sur les deux blessés. Sherockee rit doucement.

    – Les mecs, je vous vois tous un peu flou, mais on dirait que vous avez vu un fantôme… Allez ouvrir vite aux secours, je crois que je les ai entendus sonner…

    – Sherockee, vous délirez complètement ! Calmez-vous, enfin !

    Quelques instants se passèrent, Sherockee essayait de se calmer. Enfin, elle entendit des pas à côté d’elle. Les secours l’embarquèrent sur une civière. Elle ne voyait plus que quelques silhouettes floues s’activer autour d’elle. Elle bougeait ses doigts, pour garder quand même un certain contrôle de son corps. Elle sentit une main se poser sur son bras.

    – Mademoiselle ? Si vous m’entendez…

    – Qu’est-ce qu’il y a encore ? Vous ne pouvez pas me laisser tranquille trente secondes, non ?

    – Je vous l’avais dit, elle délire complètement !

    – Je vous entends Lukas, faites attention ! On est où là ?

    – Dans un camion qui nous emmène à l’hôpital, lui répondit le directeur.

    – Qu’est-ce que j’aime les camions… Dites, il y a des beaux mecs dans le camion, ou on est entouré de moches ?

    – Il va vraiment falloir vous calmer !

    – C’est ce que j’essaye de faire, mais ce n’est pas facile lorsqu’on perd autant de sang… On dirait une boucherie ! Ou un geyser ! Bon, on est entouré de beaux gosses ou de moches ?

    – Ils sont pas mal… En tout cas, j’ai déjà vu pire !

    – Cool, je ne mourrai pas avec des monstres…

    – Mais vous n’allez pas mourir !

    – Non, je le sais ! Je ne peux pas mourir comme ça ! Mais je crois que là, à choisir, j’aimerai bien… Ne poussez pas ce soupir, je sais que je délire, mais je ne peux pas m’empêcher de dire des conneries ! Et vous, les beaux gosses du camion, arrêtez de rigoler, ce n’est pas drôle ! Vous n’avez jamais vu quelqu’un délirez autant que ça, c’est ça ? Vu le silence, je dirai que non… Ne vous inquiétez pas, c’est bientôt fini ! En parlant de finir, ils ne vont pas abandonner comme ça, vous le savez ?

    – Oui, vu celui que j’ai vu tout à l’heure, je l’avais un peu compris… Merci d’ailleurs, sans vous je ne serai certainement pas en train de vous parler en ce moment…

    – Oh ! Vous savez, c’est dans mon habitude de vous défendre, les humains. Mais je veux que vous fassiez quelque chose maintenant. C’est important, alors ouvrez grand les écoutilles ! Vous devez me promettre de ne pas être seul, à aucun moment ! Je crois que pour l’instant, je vais rester avec vous, mais si je ne le pouvais pas, ne soyez jamais, jamais, jamais seul. C’est bien compris ?

    – Je vous le promets…

    – Non, je n’ai pas bien entendu ! C’est bien compris ?

    – Oui, c’est promis ! Allez, maintenant calmez-vous, on est arrivé. J’espère que le médecin qui s’occupera de vous aura de quoi ne pas devenir fou juste en vous écoutant !

    – Ne vous inquiétez pas, je commence à reprendre un peu mes esprits, enfin je crois. S’il vous plaît, ne me dites pas qu’ils vont m’examiner !

    – C’est un peu le but…

    – Pas de prise de sang, s’il vous plaît ! La dernière fois, le médecin s’est évanoui devant moi… S’il vous plaît pas de prise de sang ! Je sais quel groupe sanguin je suis, pas la peine ! Prenez du A, du B et du O, mélangez les et ce sera parfait !

    Sherockee sentit qu’on la déplaçait, mais elle dut fermer les yeux à la sortie du camion. La lumière était beaucoup trop forte à son goût. Ensuite, elle entendit le directeur soupirer et quelqu’un parler, certainement un médecin.

    – Elle est encore un peu sonnée, mais ça ne devrait pas durer, ne vous inquiétez pas. On va s’occuper d’elle, et de vous. Elle est comme ça depuis combien de temps ?

    – Au moins quinze minutes… Et encore, vous ne l’avez pas vu dans ses meilleurs moments !  

    – Ah ! Je dois vous prévenir, il reste avec moi ! cria Sherockee de sa civière.

    – Non, il faut…

    – Ah mais si ! Il va rester avec moi, sinon je vous jure que je me lève de ce foutu brancard et que je fais tout le tour de l’hôpital en courant ! Et je vous jure que je peux le faire !

    – Mais on…

    – Je m’en fous, il reste avec moi ! Allez, on y va ou vous le laissez mourir dans ce hall ? Moi je ne risque pas grand-chose, mais lui il est comme vous, constitué de sang qu’il est en train de perdre ! Allez, on y va ! Bougez votre derrière !


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